Euthanasie en France : coup d’envoi du marathon législatif

Source: FSSPX Actualités

Assemblée nationale

Le projet de loi sur l’“aide à mourir” est arrivé au Conseil d’Etat le 10 avril 2024 et une commission de députés a été chargée d’étudier le texte avant son examen en séance plénière le 27 mai. Une majorité d’acteurs de soins palliatifs se disent inquiets tandis que le Saint-Siège vient de rappeler la condamnation de l’Eglise tant de l’euthanasie que du suicide assisté.

Le lent processus qui pourrait mener à la légalisation de l’euthanasie – pudiquement rebaptisée « aide à mourir » – dans l’Hexagone est soigneusement réglé. Le projet de loi qui contient vingt-quatre articles répartis en deux volets – l’un sur les soins d’accompagnement et les droits des patients, l’autre sur l’euthanasie en tant que telle – vient d’être présenté au Conseil d’Etat.

Ce dernier l’a enregistré dans sa base de données interne : il sera consultable par les experts autorisés de la section sociale des Sages du Palais-Royal. A l’issue d’un examen, les conseillers d’Etat concernés rendront deux copies : une version alternative du projet de loi et une proposition d’avis sur le texte gouvernemental précisant les raisons qui conduisent à suggérer des modifications.

Un scrutin sera alors organisé, dont le résultat – l’avis consultatif du Conseil d’Etat – sera transmis, sous le sceau du secret, à l’exécutif, qui jugera opportun ou non d’en tenir compte. Selon l’un des membres de ce qui demeure la plus haute juridiction de l’ordre administratif créée par Napoléon Bonaparte en 1799, deux points du projet sur la fin de vie pourraient être sujets à caution.

Le premier concerne l’expression « aide à mourir » qui manquerait de « clarté » ; le second vise l’un des critères permettant d’engager le processus euthanasique : il s’agit du pronostic vital engagé « à court ou moyen terme ».

Un flou que dénoncent les professionnels de santé interrogés par la Société française d’accompagnement des soins palliatifs (Sfap) dans une vaste enquête en ligne dont les résultats viennent d’être publiés : 83% des infirmiers, bénévoles et médecins interrogés expriment leurs doutes en face d’un texte qui devrait mener à une assistance au suicide.

« Les acteurs les plus impliqués dans le processus sont les plus inquiets », résume Claire Fourcade, présidente de la Sfap, organe qui représente en France 800.000 soignants majoritairement opposés à devenir les acteurs de la mort en gants blancs.

Parmi eux en effet, l’enquête révèle que plus de 80% des soignants adhérents concernés assurent qu’ils refuseraient de prescrire, fournir, préparer et administrer un produit létal à leur patient. Un refus qui s’élève à 60% des non-adhérents qui ont répondu au questionnaire.

De plus, la moitié de tous les personnels soignants ayant participé à l’enquête préviennent qu’ils feront appel à la clause de conscience prévue afin de refuser de pratiquer un geste qu’ils estiment à juste titre aller à l’encontre du Serment d’Hippocrate : de quoi faire pâlir un exécutif qui apparaît de plus en plus hors sol et qui est à la peine dans les sondages.

Autre pierre jetée dans les jardins de l’Elysée et de Matignon : la déclaration Dignitas infinita promulguée par le Dicastère pour la doctrine de la foi (DDF) deux jours avant la présentation du projet de loi sur l’euthanasie au Conseil d’Etat.

Celle-ci – bien que s’appuyant sur des présupposés philosophiques personnalistes fort discutables – rappelle la condamnation par l’Eglise de l’euthanasie, même camouflée derrière le vocable trompeur et menteur de « l’aide à mourir dans la dignité ». Le malade, celui qui souffre, possède une dignité propre qui doit être respectée par tous : l’euthanasie est un meurtre.

Les semaines qui viennent diront si le marathon législatif d’un projet de loi dont le coup d’envoi vient d’être donné, s’apparentera davantage à un parcours du combattant. Souhaitons qu’il ne devienne pas une course à la mort.